Philippe R

Tulipes dansantes dans le soir ensoleillé,

un sourire ancien me revient en mémoire.

Philippe R., casquette enfoncée, faisant le clown en treillis.

Dans le ciel passent des nuages, blanches péniches.

C’était il y a longtemps au pied de la Forêt Noire,

nous plaisantions dans un camp militaire blafard.

« Philippe, à plus tard, après la marche », disais-je ;

quel ennui de se quitter plusieurs jours.

Le faubourg dévoile ses blancs, ses maisons,

pareil à ma mémoire, à mes souvenirs anciens.

Le thé ambré que nous préparions toujours fume

Dans une tasse disparue. C’était il y a cent ans.

Notre jeunesse, elle, n’a pas disparu.

                            Noël – avril 2013

Ode aux îles

Perles de terre dans l’attente de nous,

nous voici, portés par les courants des airs.

Vous dire, iles, sans bavardages, vous taire

aussi dans vos mystères. Nous entendez-vous ?

Sous nous, partout, la mer, grande tente bleue.

Mer à tout faire, des bains aux belle pêches.

je veux entendre comment les flots caressent

la côte, ce que peut-être ils content aux monts de feu.

Et puis voici que cette terre maintenant

nous porte. Aujourd’hui, les palmiers échevelés

nous ont conté les charmes des rivages au soleil

et nous avons goûté aux délices des bains.

Partout, nous avons croisé les habitants des lieux,

leur démarche tranquille, la retenue des gens simples.

les femmes mûres vous regardent avec dignité

quand vous contemplez leurs étals bigarrés au marché.

Après les plages et les villages de bord de mer,

nous avons peiné le long des flancs du volcan,

sous l’œil des feuillages patients,

les yeux pleins du bleu du ciel et de la mer.

Noël - Février 2013

Poème

Vois-tu, j’ai passé ma vie à attendre,

Attendre des moments tendres.

Depuis l’enfance, je rêve

À une main dans la mienne,

Dont la sève coulera dans mes veines,

Me contera la tentation

De mots doux, de confidences.

Oui, oser attendre quelqu’un ou quelque chose.
Espoir, tentation d’aller vers autrui,

Comme vers un ailleurs.
Voir en lui ou en elle d’oniriques contrées,

Ressentir d’impulsifs élans,

Des sentiments, oui, joie, plaisir, colère parfois

Comme tant de mes frères humains.
Et, comme c’est drôle, à chaque fois

Cette attente vers moi-même me ramène,

Elle provoque une rêverie dans laquelle

Je me reconnais, par quoi je retrouve une saveur

Qui est mienne, qui m’est propre,

Comme si, me diras-tu,

j’avais passé ma vie à m’attendre.

________________Noël - D’après un arbre de mots

(les dix mots de la francophonie 2012)

Poème

L’aube cherche son nom

Dans l’indécise saison.

Les montagnes cavalent après elle.

Le soleil entre dans l’eau

Dont la lumière boit la lumière.

La pierre, obstinée, s’attaque à la mer

Tout contre la terre confuse.

Ton corps est comme un regard

Au soleil d’un regard.

Ta beauté se balance sans appui

Sur sa tige de chaleur.

Enfin apparaît ton beau masque,

Je te vois en un clignement

Et tout se précipite, s’ouvre, nouveau jour.

_____________________Noël - Inspiré de O. Paz, « Liberté sur parole »